25 ans de recherches interdisciplinaires sur la restauration du Rhône

En 2024, l’Observatoire écologique du Rhône (RhônEco) et de l’Observatoire des Sédiments du Rhône (OSR) ont renouvelé leurs programmes scientifiques afin de continuer à produire des connaissances opérationnelles pour la restauration écologique du fleuve. L’occasion de partager les derniers résultats majeurs de ces observatoires et de revenir sur 25 ans de recherches interdisciplinaires et d’avancées concrètes pour la gestion environnementale du fleuve.

Le Rhône, une expérience de restauration unique

Depuis la fin des années 1990, un ambitieux programme de restauration écologique est conduit par la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Il s’inscrit dans le cadre du Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) du bassin Rhône-Méditerranée et bénéficie du soutien de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée et du Plan Rhône-Saône. Son objectif est de retrouver une certaine qualité écologique du fleuve. La restauration répond aux effets de l’anthropisation majeure de la vallée du Rhône et notamment des aménagements réalisés depuis le XIXe siècle pour lutter contre les inondations, développer la navigation, l’hydroélectricité et le nucléaire. Les actions de restauration sont pensées comme des projets de territoires et aujourd’hui construites de façon concertée.

Les scientifiques de la Zone Atelier Bassin du Rhône (ZABR) et de l’Observatoire Hommes-Milieux Vallée du Rhône (OHM VR) sont des acteurs importants de la restauration du fleuve. Ils travaillent avec les gestionnaires pour établir les diagnostics, envisager les solutions, suivre et évaluer les effets pour améliorer les pratiques. Les nombreuses recherches font de la restauration du Rhône l’une des démarches les mieux documentées à une échelle internationale.

Les connaissances scientifiques acquises depuis 25 ans permettent de mieux comprendre le fonctionnement d’un grand fleuve aménagé comme le Rhône. Elles contribuent à la définition du potentiel écologique et nourrissent les réflexions sur l’avenir du fleuve et de sa gestion. Les scientifiques questionnent ainsi la cohérence entre les efforts de restauration engagés et les usages du fleuve dans un contexte de changement environnementaux rapides.


RhônEco, un observatoire écologique au service de la restauration du fleuve depuis 25 ans

L’observatoire scientifique RhônEco accompagne le programme de restauration du fleuve depuis ses débuts. Il a pour objectif l’évaluation et la modélisation des effets de la restauration sur la biodiversité et plus largement sur le fonctionnement de l’hydrosystème fluvial.

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Grâce à un suivi scientifique interdisciplinaire exceptionnel tant par son ampleur que par sa durée, RhônEco a permis de mesurer les améliorations écologiques liées à la restauration, notamment les effets positifs sur la biodiversité. Il a dans le même temps montré que ces bénéfices sont à relativiser tenant compte de la trajectoire historique du fleuve et des impacts irréversibles des aménagements sur la biodiversité piscicole ; tenant compte également du fait que certains effets attendus de la restauration sont encore empêchés par des facteurs à caractériser (température, pollution, discontinuité…).

Les équipes scientifiques ont produit une synthèse remarquable des acquis scientifiques et opérationnels et des enjeux à relever à l’avenir pour la restauration du Rhône.

Un nouveau programme d’action RhônEco (2024-2028) est d’ores et déjà engagé afin d’aller plus loin dans la compréhension et la prédiction des effets de la restauration dans un contexte de changement environnementaux et climatiques rapides. Il affine la description des habitats afin de mieux identifier les facteurs limitant les réponses du milieu à la restauration. Il élargit également la focale d’observation de la biodiversité en regardant les effets de la restauration sur de nouveaux groupes biologiques (végétation, communautés microbiennes…). RhônEco s’ouvre en outre à l’analyse des processus écologiques fondamentaux du fleuve (productivité, cycle du carbone…) qui font aujourd’hui parti des enjeux de nombreux programmes de restauration.


Remettre les sédiments en mouvement pour redonner vie au fleuve : la dynamique hydrosédimentaire étudiée par l’OSR

L’Observatoire des Sédiments du Rhône (OSR) est un programme de recherche interdisciplinaire qui étudie le fonctionnement hydrosédimentaire du Rhône. Il a pour mission d’accompagner la gestion des galets, des graviers, des sables et des limons à l’échelle du fleuve. Les connaissances qu’il produit répondent notamment aux questions que posent la restauration et l’amélioration de la qualité écologique du fleuve.

Les aménagements du Rhône ont profondément altéré le fonctionnement hydrosédimentaire du fleuve, avec une modification des débits, des déficits de sédiments, un enfoncement du lit et une déconnexion des milieux naturels riverains. Ces évolutions ont eu des impacts forts sur la qualité écologique des milieux aquatiques fluviaux.

L’OSR a travaillé au diagnostic de l’état morphologique du Rhône et à la définition d’une stratégie de restauration de la dynamique hydrosédimentaire du fleuve. Le Schéma directeur de ré-activation de la dynamique fluviale des marges du Rhône proposé par l’observatoire est aujourd’hui mis en œuvre dans un programme de restauration porté par CNR et ses partenaires au sein du Plan Rhône-Saône.

Les travaux de démantèlement des marges et de recharges sédimentaires sont aujourd’hui engagés. L’OSR est investi dans le suivi des effets hydromorphologiques et sur les habitats écologiques de ces nouvelles modalités de restauration. Les enjeux méthodologiques sont forts et les liens avec le programme RhônEco sont étroits afin de mesurer la réponse de la biodiversité à la restauration du milieu.


Un suivi global de la restauration du Rhône coordonné entre science et gestion

Les recherches conduites au sein de RhônEco et de l’OSR contribuent à un suivi pluri-thématique de la restauration du Rhône associant gestionnaires et scientifiques. L’enjeu est de mutualiser les efforts de suivis, de partager méthodes et données, de discuter et critiquer collectivement les résultats pour évaluer et adapter les mesures de restauration dans une démarche de gestion adaptative. Un travail collectif de co-construction des suivis de la restauration a été initié dans le cadre d’un séminaire en 2020 et commence à être déployé sur les nouveaux sites restaurés dans le cadre de la redynamisation des marges du Rhône. L’interface entre les suivis scientifiques et opérationnels est co-animée par CNR et le Graie.


Comment mobiliser les acteurs autour de la restauration ? ResiRiver, un projet pour analyser et partager l’expérience rhodanienne

Depuis la fin des années 1990, les actions de restauration écologique sont de plus en plus nombreuses sur le fleuve et de plus en plus ambitieuses en termes d’objectifs et d’emprise territoriale. Elles impliquent de fait un élargissement du périmètre des acteurs concernés (élus, riverains, usagers, associations, industriels) et un développement des méthodes de mobilisation et d’organisation collective. Ces méthodes constituent un capital de connaissances et de savoir-faire encore peu mutualisé et valorisé. Il y a un enjeu à les partager et à les faire fructifier afin d’appuyer la mise en œuvre de la restauration

Le projet INTERREG ResiRiver, auquel participent l’OHM Vallée du Rhône et le Graie, doit permettre d’analyser et de partager les expériences rhodaniennes de mobilisation des acteurs du fleuve. Il permet d’animer un réseau scientifique et technique capable d’analyser collectivement ces expériences et de renforcer ses compétences pour mobiliser les acteurs des territoires rhodaniens autour des projets de restauration. In fine le projet permettra de formuler des recommandations et d’améliorer les bonnes pratiques en matière de mobilisation des acteurs pour la mise en œuvre de la restauration des grandes rivières.


Quelques ressources en français pour aller plus loin

Pour toute information, contacter Bertrand Morandi